Projet de naissance : rencontre avec Sophie Gamelin

Projet de naissance : rencontre avec Sophie Gamelin

Nous avons la chance de travailler avec Sophie Gamelin, auteure de nombreux livres sur la périnatalité et consultante périnatale au sein de l’association Future Maman en Aquitaine. Egalement mère de six enfants, et ayant vécu 10 grossesses, elle anime des ateliers et conseille les futurs parents autour du projet de naissance. Nous en avons profité pour l’interviewer et vous faire partager cette belle rencontre.

Sophie Gamelin, parlez nous de votre vie professionnelle, dévoilez nous vos multiples casquettes !

 

Photo de Sophie Gamelin

J’ai deux principales activités : mon activité en tant qu’auteur et mon activité sur internet. En tant qu’auteure j’ai écrit plusieurs livres autour de la grossesse et la naissance. De plus, sur internet j’anime un site où je diffuse de l’information. Depuis 2001 je propose la lettre périnatalité qui est aujourd’hui envoyée à 2000 abonnés environ. Je parle de l’actualité autour de la naissance, cela peut être des nouvelles des associations, la publication d’un nouveau livre, un témoignage de naissance…Enfin je suis consultante périnatale. Ce projet associatif a démarré en 2004. Etant donné que j’ai une audience nationale, les consultations individuelles ne sont pas toujours évidentes, je propose donc depuis 2006 des ateliers en groupe, pour lesquels les participants sont d’avantage prêts à se déplacer. Lors des ateliers, je réunis des parents, des futurs parents et des professionnels de santé. J’aime beaucoup animer ces ateliers. On y parle du projet de naissance qui pour moi n’est pas une simple feuille remise aux professionnels de santé mais un véritable projet de vie.

Quelle est votre expérience en tant que maman, qu’est ce que cela vous apporte ?

Je suis actuellement maman de 6 enfants, et j’ai vécu 10 grossesses. Chaque grossesse a été différente, et les naissances diverses et

variées. J’ai accouché plusieurs fois à l’hôpital (dont deux fois pour des bébés décédés in utero) et plusieurs fois à la maison, avec une sage-femme (dont une fois seule d’un bébé décédé aussi in utero). J’ai donc des expériences de naissance avec péridurale mais aussi naturellement…

Mes enfants m’apportent beaucoup, j’aime les voir grandir, s’épanouir, se différencier chacun dans la filière qui leur ressemble. J’aime avoir une famille autour de moi, que ça vive. Le défi quotidien est de savoir garder du temps pour soi, et on peut dire c’est du sport de gérer ! J’ai toujours plusieurs projets que j’avance de front. J’aime aussi me sentir entourée d’un réseau d’ami(e)s issu du monde associatif ou du monde médical : c’est aussi cette richesse qui alimente mon dynamisme.

Parlez-nous de votre parcours, comment en êtes vous arrivée là ?

En fait je suis tombée dans la marmite quand j’étais étudiante ! Lorsque j’ai passé mon Bafa j’ai choisi de me spécialiser dans la petite enfance. Je m’occupais des petits et tout petits, c’était vraiment un plaisir pour moi, j’ai toujours aimé les comptines ! Lors de mon passage en faculté de psychologie, j’ai particulièrement aimé tous les cours de sciences de l’éducation, où les pédagogies Montessori, Freinet, Steiner etc. ont attiré mon attention sur les besoins de l’enfant et l’accompagnement individualisé. Déjà, avant ma première grossesse, je m’intéressais aussi à la naissance respectée. D’abord, investie en tant qu’animatrice dans une association de soutien à l’allaitement, j’ai petit à petit orienté mon activité autour de la naissance.

A quoi sert un projet de naissance ?

Toute future maman qui a une idée (quelle qu’elle soit) de ce qu’elle veut ou pas pour le suivi de sa grossesse, son accouchement et l’accueil de son bébé a un « projet » de naissance. Un « projet de naissance » c’est avant tout définir ce qui convient pour soi à un moment donné. Cela peut être différent pour chacune des grossesses que l’on vit. En ce sens, il est important que la future maman ait accès au maximum d’informations afin de s’adresser aux personnes qui répondent à ses attentes et faire les choix qui lui correspondent afin d’éviter le trop souvent entendu : « Si j’avais su, j’aurais fait autrement… ». Il n’est pas nécessaire de « faire » projet de naissance à la mode diffusée ces dernières années, c'est-à-dire une fiche de desiderata que l’on remet au médecin ou à l’équipe médicale. Un projet ne sert pas qu'à avoir des demandes, c’est aussi comprendre plus en profondeur pourquoi on a telles demandes pour soi-même, quels points on privilégie, pourquoi certaines demandes ne sont pas possibles, comment fonctionne l’offre médicale et du coup comment on gère l'ensemble. Bref, c'est bien autre chose qu'une liste écrite.

ventre de femme enceinte

Qu’ apportez-vous aux futurs parents ?

Je leur montre qu’ils ont le choix. Le choix quant au suivi médical : une maman qui devrait par exemple être suivie par un obstétricien à cause d’une pathologie, peut très bien bénéficier parallèlement d’un accompagnement global avec une sage-femme. Le choix quant au lieu : l’hôpital n’est pas une obligation. Et si par exemple une femme souhaite accoucher à domicile mais qu’il n’existe pas de sage-femme qui accompagne ce type de naissance dans son département, elle peut se rapprocher de l’une d’elles en logeant chez des amis ou en louant un gîte. Le choix quant à l’accueil du bébé : différer la coupure du cordon, attendre qu’il ait cessé de battre, pour ne prendre qu’un exemple. Je veux aussi expliquer que ce qui peut sembler imposé n’est pas forcément obligatoire et que des alternatives peuvent être négociées comme par exemple, poser une voie veineuse à la place d’une perfusion. Si je devais résumer je dirais qu’on doit être à l’écoute de soi-même et de ses besoins, en faisant fi des modes, pour vivre une naissance épanouie.

Quel est le profil des parents qui vous consultent ?

Le profil des parents est très varié. Je ne pense pas qu’il y ait un profil type. Il y a 15 ans, peu de futures mamans se questionnaient pour leur premier enfant. Depuis, les choses ont évolué, les médias ont relayé beaucoup de choses et surtout, le monde associatif a beaucoup œuvré, on en voit les fruits aujourd’hui : que ce soit depuis 2003 avec la journée mondiale de l’accouchement respecté ou avec les groupes de travail au sein de la Haute autorité de santé, et enfin tout ce qui est mis en œuvre par le Ciane (Collectif inter associatif autour de la naissance). Les maternités aussi ont évolué, il existe de plus en plus de salles de naissance dites physiologiques (même si le lieu n’est pas à lui seul la garantie d’une naissance respectée, il est important de le préciser). Il existe aussi des plateaux techniques où l’on peut accoucher avec la sage-femme qui nous a accompagnée pendant la grossesse. On a de plus en plus de maternités Amies des Bébés, où un effort est fait autour de l’accueil du nouveau-né. Au final, on s’adapte de plus en plus aux besoins et aux envies des futurs parents. Même s’il reste encore de gros progrès à faire, je pense que les choses vont dans le bon sens. Internet est un outil formidable pour transmettre les informations et les rendre accessibles au plus grand nombre. C’est un outil d’échange et de partage incomparable qui permet un travail collectif efficace. L’important est que l’offre de soins soit aussi diversifiée que possible afin de permette à chacune de faire le choix qui lui convient.